Votre âme vous laisse tranquillement. Vous êtes face à un grand vide, et en même temps c'est une muraille, étrange ambivalence. C'est une muraille blindée noire, métallique, bien épaisse. Votre épée ne peut rien y faire. Un pas de plus, c'est le vide. Un pas de plus, c'est impossible, il y a ce mur, et pas moyen de passer au-dessus, ni creuser en dessous, ni passer à droite, ni à gauche...
Fuir ?
Vous pouvez vous retourner oui. Mais vous avez déjà essayé. La vie vous ramène toujours devant, d'une manière ou d'un autre. Vous pensez même que si vous vous laissez mourir, la prochaine vie vous la ramènera.
Vous vous sentez cerné.
Le Doute... Le fieffé Doute !
"... pourquoi as-tu douté ?..."
Ces paroles vous reviennent en écho, comme s'il était juste à côté de vous. Oui. Pourquoi ai-je douté ? J'avais pourtant été prévenu, il me semblait avoir tout compris... J'enrage !
Voilà que je me parle à moi-même... Je suis bien seul. Seul... Oui, je vais finir ma vie ainsi, entouré de ce mur, devant ce vide infranchissable...
"... au moins, tu es en vie... que choisis tu ? La vie ou la mort ? ..."
D'où provient cette voix ? La question est bonne, oui.
Qu'est-ce que je choisis ? La vie, bien entendu...
"... alors... lève toi..."
... et marche, oui... Merci... Elle est facile celle-là !
"... oui, très..."
Es-tu cynique maintenant ? J'aimerais bien t'y voir !
"... je suis déjà passé par là... il te suffit de faire un pas pour me rejoindre de l'autre côté..."
Un pas... Mais par où ? Je n'en peux plus !
"... Viens..."
Mais c'est un grand vide ! Il ne me reste plus grand chose déjà, je ne ressemble plus à rien ! J'ai tout laissé derrière-moi... Que vais-je devenir ? Ce n'est pas une vie cela...
"... non... ce n'est pas une vie, tu as raison... c'est La Vie..."
Que me dis-tu là ? C'est La Vie ?
"... tu le verras bien, viens... toi seul peut faire cet ultime pas... je ne peux que te dire de venir... "
Cet ultime pas... Lequel est-ce pour vous ? Êtes-vous devant cette grande impossibilité ? Elle n'est pas la même pour tous, cela dépend du parcours de chacun.
Nous continuons métaphoriquement.
Qui es-tu d'abord ?
"... seul ton cœur est en mesure de te le dire..."
Vous regardez votre épée, longue, brillante, effilée, une double lame de rasoir vibrante, effrayante parfois de sa froideur... Vous plongez votre regard sur le miroir pur de sa lame, à la recherche de ce qui reste encore en vous qui vous empêche de continuer, qui dresse cette muraille, qui vous angoisse tellement et qui créé ce grand vide infranchissable... Votre regard ne cille pas, vous rassemblez votre courage, votre volonté, votre Foi. Là... Vous touchez en pleine conscience la signification de ce mot, Foi ! Oui, cette Foi qui peut déplacer des montagnes dit-on...
La Foi, réduite à néant par le Doute, qui vous fait replonger.
La Foi, réduite à néant par vos Peurs, qui vous avalent intégralement.
La Foi, réduite à néant par votre petitesse et votre orgueil, qui vous font petit homme qui marche à la surface de la Terre.
Vous comprenez alors quel geste il vous reste à faire, un geste ultime, un sacrifice terrible... Oui, d'autres sont passés par là avant, effectivement...
Vous vous redressez, digne ... et vous empalez symboliquement l'épée en vous-même. En votre propre noirceur profonde, en votre matière dense, plus dense que le roc duquel vous avez retiré cette belle épée.
Non, vous ne l'utiliserez pas pour votre puissance terrestre !
Non, vous ne l'utiliserez pas pour faire la guerre à autrui !
Non, vous ne l'utiliserez pas pour asservir les hommes !
Non, vous ne l'utiliserez pas pour vous vanter de votre puissance et recréer une nouvelle adoration des masses !
Non, vous ne l'utiliserez pas pour votre personnalité, pour votre ego d'hier !
Vous regardez tout cela froidement une dernière fois, oui, et vous faites ce dernier sacrifice. Le sacrifice symbolique de vous-même.
Votre épée s'embrase d'une lumière blanche, pure, cristalline, qui désintègre les dernières traces de noirceurs, vos derniers freins...
Vous revoyez toute votre vie en accéléré et votre esprit transmute chaque expérience vécue.
Vous démontrant en quoi chaque marche fut un apprentissage.
Vous démontrant en quoi, effectivement, il y a du divin en chaque noirceur du monde, même le pire des assassins vous a appris quelque chose et vous le remerciez pour cela.
Vous démontrant en quoi, effectivement, chacun fait ce qu'il peut, à sa hauteur, là où il en est, en accord avec sa nature profonde.
Vous démontrant en quoi, ce monde est une pièce de théâtre, et que chaque être joue un rôle dessus, aveuglément.
Vous démontrant en quoi ce monde, cette planète, cette humanité, est parfaite ainsi, en dépit des apparences.
Vous transmutez ainsi chaque Ombre en Lumière.
Vous faites votre œuvre au Blanc.
Vous découvrez tout cela. Vous retirez ce qui couvrait ce monde parfait.
Vous prenez votre épée et vous la plongez dans ce mur blindé, elle y rentre sans difficulté. Vous le découpez et vous remarquez alors qu'il n'était pas plus épais que le voile de la mariée.
Vous retirez le voile de cette illusion. Fin du spectacle ! On retire le rideau !
Oui, c'est bien le monde à l'envers !
Si à la fin d'une pièce de théâtre on ferme le rideau, ici, vous le retirez définitivement. Il ne retombera plus !
Vous découvrez effectivement ce qu'il vous a dit plus haut.
C'est La Vie !
Vous riez, vous riez, qu'est-ce que vous riez !
Vous bombez le torse, bras tendus vers le Ciel !
Vous accueillez toute la Lumière du Ciel et votre regard voit alors le positif qu'il y a en toutes choses.
Oui, l'Ombre n'existe pas, ce ne sont que des zones à éclairer, et celui qui a le regard qui éclaire n'a plus jamais peur de cette Ombre.
Oui, vous voyez clair désormais, de jour comme de nuit ! Et plus rien ne pourra vous rendre aveugle de nouveau !
Le monde est si beau ! Si lumineux ! Si éclatant ! Vous remarquez autour de vous que les couleurs sont plus vives, vous voyez les détails plus précisément, vous avez l'impression qu'hier vous aviez comme un voile gris devant les yeux qui ternissait votre vue physique. Ce voile vient de se désintégrer, l'air vous apparaît pur, cristallin, merveilleux.
Vous sentez un sentiment de grande puissance, pure, digne ! Un sentiment de grande noblesse... Vous découvrez ce que signifie la Sagesse, effectivement indescriptible avec des mots...
Votre regard se porte tout autour de vous, en vous, et au dehors de vous, conscient des réalités visibles et invisibles, vous montez encore plus haut en vibration...
Vous vient une image d'ailes blanches qui poussent dans votre dos...
Alors, tel le papillon qui sort enfin de sa chrysalide, laissant sa vie de chenille d'hier au loin, vous regardez ce grand vide, et vous prenez votre envol !
Un mot résonne en vous... Le Royaume !
Oui, vous avez sous les yeux le Royaume de Dieu. Vous le voyez clairement. Il a toujours été là, il était juste caché, juste sous votre nez. Et encore, caché... non, il ne l'est même pas. Il suffirait que chacun ouvre les yeux pour le voir.
Ceci vous semble risible ! Vous regardez derrière-vous, tout ce Chemin parcouru pour en arriver là, et ce dernier geste si difficile, cette muraille infranchissable... Déjà évanouie. Déjà un vieux souvenir poussiéreux.
Il suffisait donc d'ouvrir les yeux !
Oui, mais cela, si c'est facile pour vous de le dire aujourd'hui, les autres qui sont encore dans le monde d'hier, dans ce théâtre, vous diront que ce n'est pas si facile que cela.
Et pourtant... elle tourne ! ... disait un son temps un chercheur de Vérité. Certains ont encore bien du mal à accepter les réalités matérielles du monde, alors effectivement, accepter les choses du Ciel... il en faut du Chemin.
Vous plongez donc dans ce vide céleste, vos ailes se déploient, mais comme vous êtes également dans un corps de chair, vous avez besoin d'un sol sous les pieds...
Aussitôt dit, aussitôt fait !
Que la Lumière soit !
Et devant vos yeux vous voyez se manifester une grande passerelle d'or qui vous permet de continuer votre chemin, de traverser et d'aller de l'autre côté.
Vous regardez une dernière fois derrière vous. Vous souriez à tous vos anciens compagnons de route, ceux avec qui vous avez vécu le pire comme le meilleur, vous leur faites un au revoir avec la main, avec le cœur.
Oui, ce n'est qu'un au revoir, je vous retrouverai un jour ! Je laisse des balises derrière-moi, des petits cailloux blanc. Vous saurez bien les voir lorsque ce sera le bon moment pour vous d'y aller. Lorsque ce sera votre heure de découvrir ce qu'est La Vie.
Et vous partez, cette fois sans vous retourner, pour entrer pleinement, digne, noble, Roi ou Reine, dans le Royaume de Dieu.
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